Les Jeux olympiques représentent un événement sportif planétaire d'une ampleur exceptionnelle. Mais l'édition 2024 à Paris pourrait bien être ternie par une menace d'un tout autre genre : la recrudescence des punaises de lit. Loin d'être une lubie médiatique, ce risque fait l'objet de vives inquiétudes de la part des experts scientifiques. Décryptage d'un phénomène qui pourrait avoir des répercussions sanitaires et économiques considérables pour la France.
Une prolifération exponentielle ces dernières années
"Le réchauffement climatique favorise grandement la prolifération de ces insectes nuisibles, tout comme l'accroissement des déplacements humains facilitant leur dissémination"
Les chiffres sont alarmants : selon l'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses), plus de 3 millions de ménages, toute classes confondues, ont été récemment infesté par les punaises de lit en France. Une recrudescence fulgurante qui s'explique par la conjonction de plusieurs facteurs.
"Le réchauffement climatique favorise grandement la prolifération de ces insectes nuisibles, tout comme l'accroissement des déplacements humains facilitant leur dissémination", analyse Jérôme Fouillet, spécialiste des punaises à l'Institut de recherche pour le développement (IRD).
Les punaises de lit, insectes piqueurs hématophages, se nourrissent exclusivement de sang humain ou animal. Leur présence n'est plus cantonnée aux seules habitations mais gagne désormais les lieux publics très fréquentés."On les retrouve de plus en plus dans les transports en commun, les cinémas, les hôtels... Leur prolifération dans ces environnements est un signal d'alarme", souligne l'entomologiste.
Pour rappel, 37% de ces infestations sont liées à des séjours en hôtel ou Airbnb, et 19% des cas proviennent de l'acquisition de meubles d'occasion.
Une crise aux répercussions internationales
Face à l'ampleur du phénomène, la presse étrangère s'est vite emparée du sujet, dépeignant une France "infestée" et mettant en doute sa capacité à accueillir sereinement les JO 2024. De nombreux médias anglo-saxons comme le New York Times, la BBC ou Forbes se sont alarmés d'une possible "panique des punaises" à Paris. Certains ont même dressé des parallèles peu flatteurs, à l'image du quotidien britannique Metro qui a qualifié la situation d'"urgence" au même titre qu'un "attentat terroriste ou des troubles publics". Une exagération manifeste qui en dit long sur l'émoi suscité à l'international.
Un risque de dissémination accru par les JO
Au-delà de l'émoi, de nombreux experts s'accordent à dire que les Jeux olympiques 2024 représentent un risque tangible de propagation accrue des punaises de lit.
"Les déplacements massifs de population constituent un facteur clé de dissémination de ces insectes[...] Le risque d'importation et de prolifération locale des punaises est réel avec cet afflux de visiteurs internationaux", confirme Jérôme Fouillet.
Ces nuisibles se déplacent essentiellement via les bagages, les vêtements et les meubles lors des voyages.
"Avec plusieurs millions de visiteurs attendus à Paris et dans d'autres villes hôtes, le risque d'importation et de prolifération locale est réel", prévient le chercheur.
Les infrastructures d'accueil temporaires comme les villages olympiques représentent des environnements particulièrement propices aux infestations selon les experts. Un enjeu de taille pour les organisateurs. Les hôtels et Airbnb qui accueilleront des visiteurs pour les JO ne seront eux non plus pas épargnés.
"Le risque de clusters épidémiques localisés n'est pas à négliger, surtout dans un contexte de brassage intense de population", met en garde le Pr. Lise Musset, spécialiste des maladies vectorielles à l'Institut Pasteur.
Face à ce déferlement médiatique, les autorités françaises ont dû réagir pour tenter d'apaiser les craintes. Mais ces tentatives de rassurer peinent à convaincre les experts qui insistent sur la nécessité d'une véritable prise de conscience. " Il faut une stratégie massive de prévention et de lutte sur tous les fronts", plaide Jérôme Fouillet.